Annie Besant – La mort et l'au-delà

Le Kâma-Loka — Destinée de l’homme et de son corps émotionnel — Annie Besant

« Loka est un mot sanscrit que l’on peut traduire par lieu, monde, pays ; de sorte que Kâma-Loka veut dire, littéralement, le lieu ou le monde de Kâma ; et Kâma est le nom donné à cette partie de l’organisme humain qui ressent les passions, les émotions, les désirs que l’homme a en commun avec les animaux inférieurs.

Dans cette partie de l’univers, dans le Kâma-Loka, se trouvent tous les êtres humains qui n’ont plus de corps physique ni de double éthérique, mais qui sont encore emprisonnés dans le corps des émotions et des passions. […] Le Kâma-Loka est une région peuplée, tout comme notre monde, d’êtres plus ou moins intelligents, et remplie de formes et de types vivants divers, aussi différents entre eux qu’un brin d’herbe et un tigre, et qu’un tigre et un homme. Ce monde et le nôtre sont enlacés l’un dans l’autre, mais comme leur substance matérielle diffère complètement, ils existent sans avoir connaissance l’un de l’autre. Ce n’est que dans des circonstances qui sortent de l’ordinaire que les habitants de ces deux mondes peuvent avoir conscience de leur existence mutuelle. Un être humain peut, en suivant un système d’entraînement tout particulier, se mettre en contact avec plusieurs des citoyens demi-humains du Kâma-Loka et s’en faire obéir. Les êtres humains qui ont quitté la terre, et dans lesquels les éléments kâmiques étaient prédominants, peuvent être facilement attirés par les éléments kâmiques des vivants et, avec leur aide, avoir de nouveau conscience des scènes qu’ils viennent de quitter. De même, des êtres vivants peuvent établir des méthodes de communication avec ceux qui ont quitté ce monde et, […] ayant appris à abandonner à volonté leur corps, ils peuvent grâce à certaines facultés qu’ils ont développées, pénétrer dans la sphère du Kâma-Loka. Ce qu’il importe ici de saisir et de retenir, c’est que le Kâma-Loka est une région bien définie, habitée par des êtres très variés, parmi lesquels se trouvent les humains désincarnés.

[…] Nous avons déjà dépouillé l’être humain de son corps physique et de son double éthérique ; examinons-le, maintenant, dans cet état de courte durée qui suit immédiatement la perte de ces deux corps.


Annie Besant (1847-1933)


Prâna, cette portion de l’énergie vitale que l’homme s’approprie pendant son incarnation, ayant perdu son véhicule, le double éthérique, lequel, de même que le corps physique, s’est soustrait à la force qui le gouvernait, est obligé de retourner au grand réservoir de la vie universelle. Pareil à de l’eau contenue dans un verre que l’on plonge dans un bassin et qui, lorsque le verre se brise, se mêle forcément à l’eau qui l’entoure, Prâna, lorsqu’il a perdu les corps qui formaient son enveloppe extérieure, se mêle de nouveau à la vie universelle. Ce n’est « qu’immédiatement après la mort » que l’homme est quintuple dans sa constitution, car Prâna, en tant que principe distinctement humain, ne peut plus exister comme tel, une fois que son véhicule est en décomposition.

L’homme se trouve alors seulement revêtu par le Kâma-Rûpa, ou corps de Kâma, le corps du désir, matière astrale fort éthérée, qu’on appelle souvent « fluidique » à cause de la facilité avec laquelle elle reçoit des formes projetées du dehors, ou moulées du dedans. L’homme véritable, la triade immortelle, est là, revêtu de son dernier vêtement terrestre, de cette forme subtile, sensitive et responsive, à laquelle, pendant son incarnation, il a dû la faculté de sentir, désirer, jouir et souffrir, dans le monde physique. […]

Le corps du désir subit, peu après la mort, un changement marqué. Par suite des différences de densité de la matière astrale dont il est composé, une série de coques ou enveloppes se constitue, les plus denses défendant, à l’extérieur, le moi conscient des moindres contacts et atteintes du dehors. Si rien ne la trouble, la conscience se replie sur elle-même et se prépare pour le prochain pas en avant, pendant que le corps du désir désintègre, une à une, ses coques ou enveloppes.

Jusqu’au point de réarrangement de la matière du corps du désir, l’état après la mort est à peu près le même pour tous : une demi-conscience de soi, rêveuse et paisible […] ; dans les cas les plus favorables, on passe, sans se réveiller, de cette demi-léthargie à « l’état d’inconscience pré-dévachanique », état où l’on n’a plus conscience de rien, et à la fin duquel on s’éveille heureusement dans le Dévachan, pour y jouir du repos qui sépare deux incarnations. Mais comme, arrivé là, différentes possibilités se présentent, nous décrirons, d’abord, l’évolution normale et non interrompue qui a lieu dans le Kâma-Loka, jusqu’au moment où l’être atteint le seuil du Dévachan ; alors nous examinerons les cas soumis à des conditions d’un autre ordre.

Lorsqu’une personne […] s’est toujours appliquée à s’identifier avec la partie supérieure plutôt qu’avec la partie inférieure de son être, ses émotions ont été faibles et modérées. Elles ne pourront donc pas s’affirmer fortement dans le Kâma-Loka, après la séparation du corps physique et du double éthérique, après le retour de Prâna à l’océan universel de la vie, quand l’être n’est plus revêtu que du Kâma-Rûpa. Durant la vie terrestre, Kâma et le Manas inférieur sont liés fortement ; dans le cas dont nous parlons, Kâma est faible, Manas inférieur l’a beaucoup purifié. L’intelligence qui s’est mêlée aux passions, aux émotions et aux désirs, les a également purifiés, s’est assimilé leur partie élevée, l’a pour ainsi dire absorbée en elle-même, de sorte que tout ce qui reste de Kâma n’est qu’un résidu facile à rejeter, et dont la Triade immortelle se débarrasse aisément. Cette Triade immortelle, l’Homme véritable, concentre lentement ses forces, rassemble les souvenirs de la vie terrestre qu’elle vient de quitter, ses affections, ses espérances, ses aspirations, et se prépare à sortir du Kâma-Loka pour passer dans le repos heureux du Dévachan, le « séjour des Dieux » ou, comme disent quelques-uns, « la terre de félicité ».


Helena Petrovna Blavatsky, dans La Clef de la Théosophie, affirme que le Kâma-Loka « …est une localité astrale, le Limbus de la théologie scolastique, l’Hadès des anciens ; strictement parlant, il n’est une localité que dans un sens relatif, car il n’a ni circonférence définie, ni limites précises, mais il existe déjà dans l’espace subjectif, c’est à dire au-delà de la perception de nos sens. Pourtant, il existe, et c’est là que les eidolons astraux de tous les êtres qui ont vécu, y compris les animaux, attendent leur seconde mort. Pour les animaux, elle vient avec la décomposition et la disparition de leurs particules astrales. Pour l’eidolon humain, elle commence lorsque la Triade Âtma/Buddhi/Manas se sépare des principes inférieurs ou reflet de son ex-personnalité, en tombant dans l’état dévachanique ».


« Cette seconde mort est donc le passage de la Triade immortelle de la sphère du Kâma-Loka, si intimement reliée à celle de la terre, à l’état supérieur du Dévachan, dont nous parlerons plus tard. Le type humain que nous considérons à présent, passe le Kâma-Loka dans cet état léthargique et paisible déjà décrit et, si rien ne vient le troubler, il ne redeviendra conscient qu’après qu’il aura passé par ses différents stages et que le calme aura fait place à la joie suprême ».

Annie Besant, La mort et l’au-delà, Ed. Adyar, pp. 39-49, extraits choisis

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